... C'est bien toi ?


caitlyn jones & peter winston




Je m’étais couché tard, hier soir. J’avais même eu du mal à m’endormir. Pas parce que j’avais peur que les cauchemars reviennent, ou parce que le vent soufflait contre les vitres du bungalow, mais parce que je ne voulais pas m’enlever l’image du visage d’Ellie dans ma tête. Elle était pareille que tout à l’heure. Ses joues blanches étaient colorées de rose, et ses cheveux châtains voletaient librement. Son regard vert me fixait inlassablement, je pouvais y lire d’innombrables choses, la joie, le bonheur, l’amour… Oui, car aujourd’hui serait un jour nouveau, et que j’avais hâte de la revoir. Elle et son si joli sourire. J’avais hâte de pouvoir lui parler, de pouvoir l’embrasser de nouveau, de caresser sa peau chaude et délicate.
Le sommeil m’avait tout de même enveloppé au beau milieu de la nuit, et je ne pus m’empêcher de sourire lorsque je m’éveillais lentement. Une nuit sans rêve, quelque chose qui ne se produisait que très rarement, voir même pas du tout. J’étais reposé, et près à vivre une autre journée. Je savais qu’elle serait meilleure que toutes les autres. J’avais comme une sorte de… pressentiment.
Après mettre habiller d’un jean noir et d’une chemise rouge à carreau – les premiers vêtements qui me tombaient sous la main – je sortais dehors. Le sourire sur mes lèvres ne s’était toujours pas effacé, et je marchais jusqu’à un endroit qui ne m’était pas familier, mais qui me plairait certainement.
La bibliothèque n’était pas bien loin de mon bungalow, et je ne mis pas longtemps à m’y rendre. Le ciel était bleu. Ma couleur préféré. Décidément, tout allait bien, aujourd’hui. Une fois arrivé, j’ouvrais le battant et entrais. Je ne vis que la bibliothécaire qui feuilletait tranquillement à son bureau, et deux ou trois personnes derrière les grandes étagères. J’avais l’impression d’être dans un joli rêve. J’adorais lire, et ici, j’étais comblé. J’entrepris de faire le tour de la salle, jetant des coups d’œil aux titres les livres. Des livres usés, ou des nouveaux, j’avais l’embarras du choix. Je tombais sur les œuvres de Stephen King, un écrivain que j’avais toujours énormément appréciait. Je me souvenais encore la fois où ma mère m’avait acheté « Charlie », qui était devenu par la suite mon livre favori. Je l’avais tellement usé à force de le lire que certaines pages s’en aillaient. Je pris l’exemplaire sur l’étagère et m’assis par terre. Je lus la première phrase, que j’avais déjà lu une bonne dizaine de fois : « Papa, je suis fatiguée, se plaignit la fillette en culotte rouge et chemisier vert. On s’arrête ? »
Un frisson me parcourut l’échine. Je suis fatigué… Je repassais dans ma tête la scène, dans la forêt. Papa, je veux arrêter de courir, je suis fatigué… Je me revoyais courir, le plus vite possible, jusqu’au campement. Je répétais cette phrase, sans savoir si mon père l’entendrait. Peut-être que c’était la dernière phrase qu’il avait entendu…
Je refermais le livre. De fines goutes d’eau perlaient sur mon front. Et moi qui croyait que tout était fini, que je ne penserais plus jamais à ça. Il fallait croire que je m’étais trompé… J’en avais encore plus un bon moment, avant d’oublier.

Un miracle s'était produit dans la vie de Caytlin cette nuit. Elle avait dormit au moins 5 heures. Elle aurait pu dormir plus mais elle s'était couché à 1 heure du matin seulement. De 23 heures jusqu'à 1 heure, elle avait dessiné. Ça faisait du bien de dessiner parfois, même si elle ne possédait pas un talent si énorme dans cet art. Elle avait d'abord décidé de dessiner le garçon qui dormait dans le lit oposé au sien puis après quelques minutes, elle s'est rendu compte qu'elle ne le regardait plus du tout. Elle regardait un image qui était resté gravé dans sa tête, celle du visage de Duncan. Elle s'était souvenu facilement de ses yeux hésitants et triste et de son soufle contre son visage. Elle avait ressenti un certain malaise à toutes ces pensées alors elle s'était arrêté là. Elle n'avait cependant pas fermé sa lampe de chevet, se contentant de rester étendue en pensant aux derniers jours.

En fait, ces derniers jours avaient été plutôt ordinaire. Elle n'avait pas parlé à beaucoup de personnes. Elle avait dit bonjour aux professeurs et tenté de repousser les gens trop curieux qui tentaient de l'aborder. Tous, sauf Duncan. Elle s'était endormi sur cette pensée.

Ce matin, elle n'avait pas perdu temps et s'était levé pour sortir de son bungalow. Elle avait opté pour le confort alors elle avait enfilé des pantalons jogging, une camisole jaune pâle et une veste ouverte par-dessus. Elle ignorait s'il faisait si froid dehors mais après tout, c'était seulement le matin. Elle s'était alors dirigé vers un endroit qu'elle avait fréquenté au moins une fois par jour depuis son arrivée : la bibliothèque. Lorsqu'elle y allait, elle ne faisait que se promener à travers les allées et hier, elle avait commencé à lire un livre de Stephen King, un auteur qu'elle ne lisait pas beaucoup. La raison pour laquelle elle avait commencé à lire ce livre était qu'elle se souvenait que Peter, le garçon avait qui elle correspondait par lettre, lui avait dit qu'il adorait cet auteur.

En arrivant à l'allée dans laquelle ce livre était, "Charlie", elle avait alors remarqué qu'un garçon était déjà en train de lire ce livre. Au lieu de repartir, elle resta planter là à le regarder. Il ne s'en rendait pas compte jusqu'à ce quelqu'un passa derrière elle et lui fit peur. Elle eu alors le saut et la majorité des livres sur les étagères près d'elle tombèrent.

"oh, non!" S'exclama-t-elle.

La bibliothèque était silencieuse. J’aimais principalement cet endroit pour cela, son calme reposant, sa sérénité. Un peu comme moi. J’aimais souvent m’y réfugier, lorsque j’étais au lycée. Je le faisais en cachette des autres, car ma bande de copain ne m’aurait probablement plus parlé. J’étais déjà assez différent d’eux, toujours calme, quoi qu’il puisse arriver. Je ne cherchais jamais la bagarre, ce n’était pas dans mes priorités, je détestais même cela. A quoi bon, de toute façon ?
Ma respiration était redevenue normale. Me souvenir de mon passé n’était pas le jeu que je préférais. J’étais même horrifié de faire un énième cauchemar, de revoir cette forêt sombre, ses arbres, plus haut les uns que les autres et qui m’entouraient, m’enfermant dans un monde noir. Oh, j’en avais tellement peur, chaque nuit je redevenais cet enfant dont le visage ne reflète qu’un vide immense, cet enfant renfermé et seul.
Je secouais la tête pour m’enlever ses pensées. Je divaguais beaucoup trop, c’était lassant. Je ne pouvais m’empêcher de repenser à tout cela.
Un bruit de chut et une protestation me firent tourner vivement la tête. Je croyais être seul, dans le rayon, mais apparemment, non. La scène pouvait presque paraitre comique. A ma gauche se trouvait une jeune fille – ou plutôt femme – aux cheveux couleur chocolat. Son visage me fit tout de suite penser à un petit… lutin. Un être mignon et gentil. Tout autour d’elle se trouvait des livres, de toutes tailles, éparpillés à ses pieds. Je me mis à rire de la situation, et, voulant aider, je m’empressais de venir remettre les livres à leur place.

« Je pense que les livres ne t’ont fait aucun mal, dis-je en riant. »

Sa maladresse me fit de suite penser à celle d’Ellie, qui m’attirait plus particulièrement. J’avais toujours aimé regarder les attitudes des gens qui m’entouraient, décrypter tous leur faits et gestes. Cela m’aidait à découvrir quelle personne ils étaient. J’avais tout de suite comprit qu’Ellie était une de ces filles gauches et têtues, dont rien ne peut venir à bout, sauf peut-être elles-mêmes.