Je m'en voulais un peu, d'avoir toujours des réactions si... impulsives et si douteuses. Il m'arrivait de dire des choses sur un coup de tête alors que je n'en pensais pas un mot. Je savais qu'elle me faisait confiance, après toutes ces années passées à se confier l'un à l'autre sans que jamais un secret ne soit révélé. On avait des bases solides tous les deux. On pourrait tout affronter, les moindres remous de la vie de la plus petite vaguelettes au plus grand tsunami. Notre confiance et notre amitié était faites pour durer. D'ailleurs j'avais de plus en plus de mal à comprendre mes réactions et j'étais moi-même surpris par mes pensées étranges. Tout cela m'amena à une réflexion profonde sur ce que j'avais bien pu faire avant de venir qui me mette d'une humeur aussi détestable et ce que j'avais bien pu entendre pour douter autant de la confiance qu'elle m'accordait. Je ne trouvais pas de réponses et devant son silence, je décidais de ne pas insister. J'avais déjà compris face à la mine qu'elle affichait que mes propos l'avaient choquée.

En vérité, je l'admirais pour la force qui émanait d'elle, elle avait toujours fait face sans avoir besoin de se raccrocher à une quelconque drogue. Elle avait toujours fait passer les problèmes des autres avant les siens. Tous ses amis pouvaient compter sur elle à n'importe quel moment du jour et de la nuit. Moi je n'étais qu'un pauvre égoïste borné, je pensais sans arrêt à mon confort personnel, à mon bonheur, à comment j'allais m'en sortir... Je ne pensais pas à ce que pouvais ressentir les autres autour de moi. Jamais. Je n'avais pas pris deux minutes pour faire le point, je n'avais pas réfléchi à ce que pouvait ressentir mes amis. A ce qu'elle pouvait ressentir, elle. La plus belle chose qui ne me soit jamais arrivé. Avais-je seulement réfléchi deux minutes à ce qu'elle pouvait vivre face à mon absence de réaction, face à ma dépendance? Et elle, elle tenait bon, patiente. Elle voulait absolument que je m'en sorte et elle ne me mouftait pas face à mes réactions excessives... Elle se contentait d'essayer de me raisonner, elle ne m'avait jamais lâché. Je lui devais tellement. J'aurais vraiment voulu m'arrêter de lui relancer des piques à chaque fois mais c'était plus fort que moi, je n'aimais pas me rabaisser. Mais, au fond, c'était idiot, je me rabaissais tous les jours avec cette histoire de dépendance. J'étais faible et elle était forte, l'histoire était aussi simple que ça.

C'était une question de fierté, demander de l'aide à n'importe qui aurait été me rabaisser. Même demander de l'aide à ma meilleure amie, c'était trop. Même si je la connaissais depuis tout petit et que je savais qu'elle ne me jugerait pas. Je soupirais. J'étais vraiment infernal. Mais non, c'était loin d'être un faux espoir, malgré tout, je voulais m'en sortir. Sortir la tête de l'eau et respirer à nouveau, c'est tout ce que je demandais. Mais à présent c'était comme si le sol de la piscine avait disparu et que je ne pouvais exercer une pression sur aucune paroi pour remonter à la surface. Et j'avais besoin de quelqu'un comme elle, quelqu'un qui ne voulait pas renoncer, parce que j'étais prêt à laisser tomber.

C'était vrai, on avait tout deux des caractères opposés et forts. Jamais l'un ou l'autre ne s'écrasait, on voulait toujours avoir le dernier mot. Ce qui nous attirait bien souvent des clash. J'étais sur que c'était elle qu'il me fallait mais je n'avais pas vraiment d'indices à lui livrer, je ne savais moi-même comment je fonctionnais réellement et ce qui allait me faire arrêter. Sinon, je l'aurais déjà tester depuis longtemps. Il était vrai également qu'on se connaissait trop bien et vu qu'on se livrait l'un à l'autre sans retenue, on lui livrait aussi les clés pour nous faire du mal et c'est ce qui se passait entre nous. On savait ce qui était susceptible de faire mal à l'autre. Je ne souhaitais pas qu'elle s'en aille, mais je la laissais faire. Après tout, c'était le plus sur moyen de ne pas se disputer davantage et je ne voyais bien qu'il n'y avait pas que ça, elle avait besoin de réfléchir dans un coin toute seule pour faire le point.

En partant, elle chuta. Je m'avançais vers elle, elle faisait vraiment peur à voir et je ne pus m'empêcher de laisser moi aussi échapper un petit cri de douleur quand je vis l'état dans lequel elle s'était mise. La pauvre, ce n'était décidément pas son jour et je m'en voulais de l'avoir attristée alors qu'elle n'allait déjà pas très bien. Elle avait l'air fragile, assise ainsi sur les rochers et je n'avais qu'une envie: la prendre et l'emmener loin, loin de ce mal et de ces sentiments qui la gênaient tellement.


H. A ma... Ma cheville... J'ai mal...

G. Oui, j'ai vu. Doucement Hope chérie, ça va aller.


Je lançais sur elle un regard fraternel, protecteur, comme si j'avais peur qu'il lui arrive à nouveau malheur. A première vue, sa cheville était simplement bien tordue mais enfin je n'étais pas médecin. Quand je lui déposais un bisou, sur la joue, elle se mit à sangloter de plus belle. Je me demandais vraiment ce qui clochait avec moi, en ce moment ! Je voulais la réconforter et voilà qu'elle se mettait à pleurer de plus belle. J'étais désemparé, je ne savais plus trop ce qui se passait. Est-ce qu'elle me détestait? Est-ce qu'elle ne voulait plus me voir près d'elle. Je reportais mes questions à plus tard, il y avait plus important dans l'immédiat.


H. Oh Gregory je suis... Désolée pour ce que j'ai dis. Je... Je regrette tellement. Pardonne-moi, s'il ... S'il te plait.

G. C'est moi qui suis désolé ! Je suis tellement borné... Je te promets que je me battrai mais c'est pas facile, tu sais.


Je lui souris. Au fond de moi, j'étais un peu vexé qu'elle n'ait pas répondu à mon "je t'aime" même si je n'en connaissais moi-même pas la valeur exacte. Quoi qu'il en soit, ces trois petits mots sonnaient si juste quand c'est à elle que je les offrais que je n'avais pas pu m'en empêcher. Elle était contre moi, trempait et tâchait de sang mon t-shirt, mais j'en m'en moquais bien, c'était tellement agréable, comme instant. Qu'elle était belle notre amitié éternelle, j'avais l'impression de tout gâcher avec mes sentiments...

G. On va aller voir un médecin, quand même je crois que c'est plus prudent.

Je lui dis d'une voix douce. Je sortis un mouchoir de ma poche; lui en tendant un pour ses larmes et en utilisant plusieurs pour nettoyer un peu le sang qui coulait le long de son bras.